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Actualités

COVID-19 et droit au travail

Alerte COVID-19

Par Damiens Aw

La pandémie du COVID-19 a amené le Sénégal à prendre plusieurs mesures de restrictions des libertés, d’interdictions des déplacements et de fermeture des frontières.

C’est dans ce cadre que l’Assemblée Nationale a voté le 1 avril 2020 la Loi 2020-13 habilitant le Président de la République à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi, et ce, en vertu de l’article 77 de la constitution. 

En vertu de cette loi, promulguée le 2 avril, le Président de la république a pris l’Ordonnance n° 001-2020 du 8 avril 2020 aménageant des mesures dérogatoires au licenciement et de réaménagement du régime du chômage technique durant la période de la pandémie du COVID-19.

L’ordonnance vise d’une part à restreindre le recours au licenciement dans les limites de la loi d’habilitation, et d’une part, à garantir un revenu au travailleur mis en chômage technique.

Cette ordonnance a suscité des questionnements de la part des entreprises dont la plupart avait commencé à prendre des dispositions sur le chômage technique et même des licenciements.

L’objet de cette note est de faire la lumière sur le contenu de cette ordonnance, et sur les restrictions qu’elle apporte aux pouvoirs reconnus par le Code du travail aux chefs d’entreprise.

1. Champ d’application de l’ordonnance 

  • Le champ d’application matériel 

L’ordonnance prise par le Président de la république ne concerne que les motifs de licenciement et leurs modalités de mise en œuvre prévues aux articles L.49, L.60 et L.214, et le chômage technique prévu à l’article L.65 du même code notamment par rapport à la rémunération.

  • Champ d’application temporel 

Du point de vue temporel, l’ordonnance est applicable rétroactivement depuis le 14 mars 2020 et ce durant toute la durée de la loi d’habilitation.

En conséquence tout licenciement prononcé autre que celui motivé par une faute lourde est nul et de nul effet.

Il va sans dire que l’employeur qui avait pris des mesures de licenciement autres que celles motivées par une faute lourde sont tenus de réintégrer les travailleurs concernés.

2. Mesures dérogatoires

  • Les motifs de licenciement

Il ressort de l’article 1er de l’ordonnance que, durant toute la pandémie du COVID-19, tout licenciement autre que celui motivé par une faute lourde du travailleur est nul et de nul effet.

En conséquence, seul le licenciement pour faute lourde est accepté, étant précisé que la qualification de la faute lourde est laissée à l’appréciation du juge.

Ainsi, cela requiert évidemment de la prudence pour toute velléité de contournement de la loi pour arriver à un licenciement pour faute lourde.

  • Le chômage technique

L’ordonnance apporte également réaménagement aux dispositions relatives au chômage technique prévus par l’article L.65 du Code du travail pour garantir au travailleur mis en chômage technique un minimum de ressources.

L’ancien article L.65 disposait que l’employeur pouvait, après consultation du délégué du personnel, décider de la mise au chômage technique de tout ou partie du personnel de l’entreprise.

A défaut d’une réglementation dans la convention collective applicable ou dans l’accord d’établissement, l’information de l’inspecteur du travail était requise. Un accord entre les parties pourrait préciser la durée et le cas échéant la rémunération.

Or, il résulte de l’article 2 de l’ordonnance que « l’employeur doit rechercher avec les délégués du personnel ou, à défaut, les représentants du personnel, des solutions alternatives telles que la réduction des heures de travail, le travail par roulement, l'anticipation des congés payés, le redéploiement de personnel, le travail à temps partiel ».

Donc deux possibilités s’offrent à l’employeur : soit l’adoption des mesures alternatives, ou le chômage technique.

  • En cas d’adoption de mesures alternatives, la rémunération ne peut être inférieure ni au salaire minimum interprofessionnel garanti ni à 70% du salaire moyen net des trois derniers mois d'activité.
  • En revanche, si l’employeur décide de recourir au chômage technique, la durée de celui-ci ne peut dépasser les limites de temps de la loi d'habilitation, étant précisé que celle-ci dure trois (3) mois à compter du 2 avril 2020.

Pendant cette période, le travailleur perçoit une rémunération qui ne saurait être inférieure ni au salaire minimum interprofessionnel garanti ni à 70% de son salaire moyen net des trois derniers mois d'activité.

  • L’accompagnement de l’Etat

L’Etat a prévu d’accompagner les entreprises qui auront adopté le chômage technique avec l’assurance de rémunération au travailleur.

  • Obligations du travailleur mis au chômage technique

Le travailleur est toujours régi par les liens de subordination, et il est tenu de rester à la disposition de son employeur durant toute la période d’inactivité.

Celui-ci peut l’occuper à des travaux ponctuels relevant de son domaine de compétence.

A défaut, il perd son droit à la rémunération telle que défini ci-haut.

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